D'un monument à d'autres...
© Collectif « Paradoxes d'ambiances »
Les cimetières, champs de repos de nos morts ne sont pas des voisins toujours appréciés. Ils nous renvoient à notre propre finitude, nous rappellent des moments douloureux, évoquent un monde inconnu qui est notre destin commun. Pour autant, le calme et la végétation qu’ils nous offrent sont très prisés, particulièrement dans les milieux très urbanisés qui correspondent à nos terrains d’enquête.
Le situation de surplomb au dessus de la canopée des arbres du cimetière de Neuilly est confortable. La vue sur les tombes se dérobe ici ou là, au rythme des saisons. Pris pour un parc par les passants occasionnels ou les touristes, le cimetière a une canopée rénovée depuis la création de la passerelle. Pourtant son accès reste une énigme, peu encourageante pour les promeneurs urbains. La cohabitation urbaine entre cette pièce funeste et intouchable et les aménagements progressifs de La Défense donne lieu a un jeu d’impasses, d’énigmes, de traces de projets inachevés, de traces de chantier permanent, de ruptures d’ambiances dans les couches du mille-feuille. Espace de multiples projections et symbole de la poursuite du grand axe au delà de l’Arche, la pièce contenant les deux cimetières et traversante par la jetée restait encore en suspend pendant notre enquête. Au début des années 90, quand l’EPAD choisi les architectes Paul Chemetov et Borja Huidobro ainsi que le paysagiste Gilles Clément pour l’extension de l’aménagement de l’axe historique, ceux-ci voient dans ces cimetières la possibilité d’offrir une poche verte à l’univers de béton et de verre de La Défense. Ils imaginent relier les deux cimetières entre-eux au niveau des jardins de l’Arche par un passage bordé de cèdres. Nous verrons que cette connexion n’a pu être réalisée. On limite au maximum les frottements. Peut-être peut-on à ce titre plutôt parler de coexistence.
Aujourd’hui les travaux pour l’Arena 92 ont débutés et une reconfiguration des usages et potentielles approprations se profile.
Les abords du cimetière sont le terrain d’une guerre foncière et symbolique qui se solde par une mise à distance de l’accès unique – les accès secondaires donnant sur le jardins de l’Arche sont condamnés, et la restriction des vues sur le cimetière par de nouvelles constructions. Il est évident que ce cimetière « fait tâche » ici et sa présence surprend.
Les accès aux cimetières ont été déplacés sur les boulevards extérieurs au moment de la construction des boulevards de ceinture de La Défense. La ville de Neuilly explique sur son site internet qu’il faut pour se rendre au cimetière nouveau en transport en commun “descendre à La Grande Arche et suivre les indications” en précisant entre parenthèses: « moyen d’accès assez compliqué ». Une expérience de mobilité éprouvante.